mardi 28 octobre 2008

Courte chronologie militante au Saguenay

Ce texte traitera de la dernière année scolaire (d’août 2007 jusque vers juin 2008), mais ne dressera pas une liste exhaustive de tout ce qui a pu se passer au Saguenay (entres autres au niveau des conflits de travail), puisque je n’en sais pas autant. Je tenterai plutôt de partager avec vous près d’un an de luttes sociales pour démontrer qu’il y a bel et bien à faire et que la lutte est possible dans les régions éloignées des grands centres urbains, même celles réputées comme « conservatrices ». La chose donnera un aperçu du climat, qui durant cette année a attiré pas mal d’attention des niveaux national et même, international. Je souhaite préciser qu’il ne s’agissait pas d’une année exemplaire en luttes et je regrette, par manque de connaissances encore, de ne pas pouvoir traiter des dernières années qui ont aussi connues leurs actions radicales et de celle actuelle. Les luttes du PCR (co)-Saguenay puis, le militantisme du CRAC aurait pu être intéressant. Durant cette année, le « blog de combat » « Sag-Lac – Résiste au Militarisme » (http://resistance-02.blogspot.com) a été tenu, duquel je vous présente plusieurs extraits.


Le 11 septembre, à Jonquière, une quinzaine de personnes ont participé à une activité organisée par les Bleuets pour la paix, visant à manifester une opposition au Caucus québécois des conservateurs, un caucus privé qui avait lieu dans un hôtel. Les manifestant-e-s sont entré-e-s avec succès dans la salle où se tenait le caucus et certain-e-s se sont joint-e-s au cocktail particulièrement riche et vieux, débordant du même coup le service de sécurité de l’hôtel. L’action a été suivie par l’expulsion du groupe, en cortège, hors du bâtiment. Des journalistes de différents médias étaient présent(e)s à l’extérieur pour collecter les commentaires de l’organisation pacifiste, qui a créé en 2003 ou avant.

Le 20 septembre, le maire Tremblay, en poste à Chicoutimi (devenu Saguenay) depuis 1997 (11 ans), présente son mémoire à la commission Bouchard-Taylor (sur les accommodements raisonnables) au nom de la population de ville Saguenay. Au nom de la population celui-ci y véhicule des idées révisionnistes, nient les droits sociaux obtenus dans les dernières décennies et prône un retour au confessionnalisme et au pouvoir de la religion dans l’État. Ce mémoire a été écrit par le théologien Jean-Paul Simard et pour rémunérer la production d’un tel document, le maire a prit 10 000$ de l’argent des citoyen-ne-s. Le document réactionnaire est diffusé sur internet et des copies papier sont distribuées internationalement.

1er octobre, près de 200 personnes participent à la séance du Conseil municipal de Saguenay. Un appel avait été lancé par des militant-e-s dans le but de reprocher au maire d’avoir présenté un mémoire au nom de la population lors de la commission Bouchard-Taylor. Au début de la séance, la fameuse prière du maire fut chahutée par la moitié des personnes présentes . Plus d’une vingtaine de citoyen(ne)s ont ensuite prit le micro pour adresser leur indignation au Maire, qui faisait monter la colère de beaucoup par ses bavures. Finalement, le citoyen Paul-Henri Croft demanda aux conseillers/ères municipaux qui n’appuyaient pas les agissements du maire dans l’affaire du mémoire de se lever debout et de s’affirmer. Le citoyen fut expulsé hors du conseil par les policiers présents et le maire décida de clore la séance. Le maire affirmera par la suite aux médias qu’il s’agissait de groupes organisés de militants professionnels.

Le 11 octobre, une manifestation au bureau du ministre conservateur Jean-Pierre Blackburn a été tenu par le groupe pour le logement social Loge m’entraide et le groupe pacifiste les Bleuets pour la paix sous le thème « Des milliards pour le logement, pas pour l’armement ! ».

Durant le mois d’octobre, lancement d’une pétition par Gabrielle Lavallée, connue publiquement pour avoir été membre de la secte de Moïse Thériault, pour que la Commission des droits de la personne et de la jeunesse reconnaissent la légitimité de la prière d’ouverture du Conseil municipal de Saguenay. Rappelons que dans la secte de Moïse, le gourou lui avait infligé de nombreuses blessures parmi lesquelles une amputation de l’avant-bras droit à froid et l’arrachage de huit de ses dents avec des pinces. Pour sa pétition, elle trouvera, entre autres, le support de Stefan Jetchick du site intégriste catholique www.inquisition.ca Voir http://www.inquisition.ca/reactions/lavalee_gabrielle.htm

Mi-octobre, L’armée canadienne tiendra des activités inspirées de la formation militaire jusqu’en décembre dans le cadre d’un programme « d’activité sportive et de plein air », dans une école primaire de la région, à St-Charles-de-Bourget. Dans la région, une controverse est suscitée dans les médias par des parents et le groupe pacifiste les Bleuets pour la paix. Aussi, des réactions fusent rapidement du niveau national.

Le 8 novembre, à l’Université du Québec à Chicoutimi avait lieu le matin un kiosque de recrutement de l’armée (lors de la foire d’emploi annuelle) et le soir, une conférence du lieutenant-colonel Jean Trudel. Le matin, quelques militant-e-s rassemblé-e-s décidèrent de voler et de cacher une nappe et une bonne partie du matériel du kiosque des recruteurs pendant qu’ils étaient aller chercher leur café. L’action fut suivie par une séance de tractage aux portes de l’université. Vers midi, les agents de sécurité arrêtèrent deux militants et appelèrent la police. Juste avant que les deux militants soient amenés au poste de police, un appel téléphonique d’un haut placé de l’armée signifia aux policiers de laisser faire pour que l’affaire ne devienne pas politique. Les deux militants furent ainsi libres et sans conditions. Le matériel des recruteurs avait d’ailleurs été retrouvé vers midi.

En soirée, près de 50 étudiant-e-s et opposant-e-s, équipé-e-s d’instruments de bruit, perturbèrent la conférence du lieutenant-colonel, portant sur la mission canadienne en Afghanistan, en faisant un tapage aux portes de l’événement. De l’entrée des participant-e-s à la conférence (15 à 20 personnes dont la moitié étaient des pacifistes) jusqu’à leur sortie(sous escorte policière cette fois), les manifestant(e)s anti-guerre se firent entendre. Un appel collectif à tenter d’entrer dans la conférence lancé parmi les manifestant(e)s mena à une bousculade avec les deux agents de sécurité Garda, qui dès le début poussaient à répétition les manifestant-e-s . Avec succès nous pûmes entrer dans le vestibule menant directement à l’auditorium. Il s’y trouvait justement une table de fer avec des marteaux et des bouts de bois avec lesquelles un tapage infernal pu être réalisés. Des témoins à l’intérieur de la conférence dirent par la suite que le vacarme était fortement audible à l’intérieur. Après cet événement, plusieurs établissements scolaires de la région refusèrent la venue de militaires par crainte que celle-ci se reproduise. Étienne David-Bellemare, un des manifestants, critiqua l’agressivité et la violence des agents de sécurité dans une lettre publiée dans le journal Le Quotidien.

Quelques jours après, sur la place publique du Cégep de Chicoutimi, à côté d’un kiosque de recrutement de la GRC, diffusion de tracts d’information sur les événements à Montréal (brutalités policières envers les étudiant-e-s en lutte et initiative de l’Université populaire à Montréal (UPAM)).

15 novembre, manifestation étudiante nationale à Montréal organisée par l’ASSÉ. Le Comité Gratuité scolaire de l’UQAC a prévu un autobus pour le transport et une banderole « Sag-Lac Contre-Attaq » réalisée collectivement par les intéressé(e)s, la veille, sur la place publique. Les associations de sociologie et anthropologie et de sciences politiques et coopération internationale de l’université étaient en grève pour la journée.

Le 24 janvier, Journée internationale d’action organisée par Solidarité Populaire et le Forum Social Régional 02 et appelée par le Forum Social Mondial. Dans la région, des manifestations ont eu lieu à Alma et à Chicoutimi « contre les politiques des gouvernements qui ont pour effet de diminuer les droits sociaux, d’entretenir un climat de guerre et d’être néfastes pour l’environnement ». À Chicoutimi, les politiciens, que devait rencontrer cette marche (de près de 40 personnes) sur la rue Racine, n’étaient pas présents à leur bureau, mis à part Jean Tremblay, qui nous a livré toute une salade de positions contradictoires avec d’autres de ses déclarations publiques. À Alma, une cinquantaine de personne ont manifesté et ont, entre autres, pri(se)s par surprise les employé-e-s du bureau du ministre conservateur Jean-Pierre Blackburn en y entrant à deux reprises.

Du 4 au 7 février, « Semaine des Sciences humaines » à l’UQAC. Une variété de thèmes liés au domaine sont présentés dont l’Anarchisme (« L'anarchisme face à l'État» de Francis Dupuis-Déry), le mouvement étudiant, les autochtones, les droits des femmes en plus d’un panel de Louis Gill et Francis Dupuis-Déry sur « Impérialisme et militarisation de la planète ».

Le 8 février, début de la grève générale illimitée à l’usine Scepter de Chicoutimi. Ce n’est qu’au mois de septembre de la même année que les travailleurs ont pu s’entendre avec les employeurs, sur un nouveau contrat de travail comprenant des augmentations salariales de 25,5% sur 6 ans et plusieurs avantages. Rappelons que la grève des travailleurs de l’entreprise dont la possession est américaine a été très ardue et qu’il y a même eut menace de fermeture durant l’été. Malgré cela, les travailleurs ont refusé les offres patronales insuffisantes jusqu’à ce nouveau contrat, considéré par plusieurs comme une victoire.

Le 12 février, dans le dossier de la syndicalisation du Walmart de Jonquière et la fermeture sauvage de la multinationale, la Cour d'appel vient de donner raison à Walmart sous le prétexte que l'employeur pourrait fermer boutique quand il le veut. Cette décision survient après que les travailleurs/euses aient obtenu gain de cause pour "non-respect du code du travail" auprès de la Commission des relations de travail en 2005 et de la Cour supérieure.

Le 12 février, Pierre Demers publie l’article « Graffitis au Saguenay » dans L’Aut’Journal, qui fait état de graffitis se multipliant et dont certains agaceraient les élus locaux et les commerces pour leur côté politique. L’article cite en particulier « Le maire suce l’Alcan » qui se retrouve à divers endroits dont des barrages et au centre-ville. Aussi, la ville aurait investi des milliers de dollar en 2007 pour faire effacer des « graffitis politiques anarchistes » sur la petite maison blanche. Voir http://www.lautjournal.info/default.aspx?page=3&NewsId=601

Le 21 février, le Comité gratuité scolaire de l'UQAC et tout un contingent "Sag-Lac Contre-attaq" participe à une manifestation nationale à Québec organisée par l’Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante pour le droit à l’Éducation,.

Le 3 mars, à la rencontre du Conseil municipal de Saguenay, un porte-parole des Bleuets pour la paix a fait une déclaration demandant au maire Jean Tremblay, qui était alors près de son départ pour Jérusalem, en territoire occupé par Israël, à l’occasion d’un colloque sur les défis des grandes villes de la planète, d’être un « Pèlerin de la paix » et lui a remis un drapeau de la paix signé pour qu’il le remette à son tour aux autorités israéliennes au nom des saguenayen-ne-s.

Le10 mars, à Chibougamau, début du blocage de la route 167, « La porte du Nord », et grève des travailleurs de l’usine Chantiers Chibougamau. Le barrage empêcha les véhicules lourds et les sous-traitants, bloquant la construction du barrage d’Eastmain 1A, mais laissa passer les simples passant(e)s.

Fin mars/début avril, le Collectif de Résistance Anti-Capitaliste – Saguenay (CRAC) réapparaît publiquement. Le CRAC est, dans ses propres mots, « une organisation non hiérarchique réunissant des individus qui partagent une unité politique face à la nécessité de s’opposer au système économique capitaliste actuel ».

Du 2 au 4 mai, s’est tenu le 3ième Forum Social Régional du Saguenay-Lac-Saint-Jean (FSR-02) au Cégep de Chicoutimi. Tout près de 200 activités (conférences, ateliers de discussion, table-rondes, expositions, spectacles, Forum des enfants,…) sur une variété de thèmes figuraient au programme des trois jours.

Le 15 mai, la Commission sur les droits de la personne et de la jeunesse tranche dans le dossier de la prière au Conseil municipal de Saguenay en affirmant qu’elle n’y a pas sa place. Voir http://communiques.gouv.qc.ca/gouvqc/communiques/GPQF/Mai2008/15/c8814.html

Vers le 28 mai, syndicalisation des 400 assistant(e)s d’enseignement de l’Université du Québec à Chicoutimi.

Le 1er juin, à Québec : Table-ronde des groupes anti-guerre à laquelle participent des membres du CRAC et des Bleuets pour la paix.

Le 28 juin, les membres du groupe Loge m’entraide et quelques sympathisant-e-s se sont rendu à bord d’un autobus à la manifestation nationale du Camp des 4 sans.

Le 3 juillet, le CRAC et les Bleuets pour la paix sont signataires et ont organisé un transport pour la manifestation contre le défilé militaire dans les rues de Québec alors que le maire Labaume avait alloué un « droit de cité » à l’armée pour sa journée de fête des 400 ans de présence coloniale à Québec.

Le 14 octobre dernier, le candidat bloquiste du compté de Manicouagan, compté voisin au mien, Montmorency-Charlevoix-Haute-Côte-Nord, aurait été élu malgré un très faible taux de participation aux élections, soit 48,5%. Quoi qu’il en soit, le système politique officiel a tout de même mis en place le candidat comme représentant au Parlement des habitants et habitantes du compté. Pour qualifier ces abstentionnistes, j’entends déjà les préjugés de paresse et d’irresponsabilités sur le bout de vos lèvres… mais il faut le rappeler, l’abstention y a été majoritaire et il y a lieu de se demander ce qui peut faire en sorte que les gens s’intéressent si peu aux chefs qui, je dis bien en principe, devraient les représenter. De plus, force est de reconnaître que le phénomène n’est pas isolé au « grand centre » de notre région puisque le plus haut taux d’abstention depuis la création du Canada (1867!) a été obtenu à l’échelle du pays.


Des raisons insignifiantes pour ne pas aller voter? Pas tant que ça! Dans les faits, les gens affirmaient dans une grande proportion un sentiment d’abandon face aux problèmes économiques, sociaux et politiques qui les touchent réellement. On ne parle pas ici de l’exploitation des sables bitumineux de l’Alberta ou de la suppression de taxes pour les grandes entreprises richissimes! D’autre part, on entendait aussi certains de nos proches parler de candidats et de candidates qui semblaient davantage jouer une « game », à la loft story, que quoique ce soit d’autres.


En définitive, en y réfléchissant, on pouvait très justement se demander si le vote pouvait véritablement renverser la tendance à l’enrichissement des plus riches aux dépends des plus pauvres de notre société. Certain(e)s choisissaient plutôt d’offrir leur confiance à des candidats assurés à l’avance d’être dans l’opposition, en dépit du faible contrepoids (et encore, quand il existait…) que ceux-ci ont pu amener, dans les années passées, face aux politiques de Harper et ses lobbies favoris.


À travers ma réflexion, j’ai finalement opté pour ne pas participer aux élections et d’ajouter ma voix à la vie politique d’une autre façon… En joignant les luttes sociales menées dans mes milieux de vie (études, région, travail, logement, …) afin d’améliorer, directement avec la collectivité, nos conditions de vie et de résister aux tendances politiques réactionnaires de chefs populistes de droite notables. La voici, la voix qui me semble pouvoir réellement changer les choses.

mercredi 1 octobre 2008

La lutte continue... consultez l'actualité du blog du CRAC et informez-vous comment vous pouvez vous y impliquer.

Longue vie au CRAC-Saguenay!

Une chronologie de lutte de l'année scolaire 2007-2008 sera probablement prochainement posté sur SagLac-Résiste, en conclusion finale.