mercredi 30 juillet 2008

«Aussitôt que je peux, je m'enrôle. Tirer, c'est ma passion.»

Un article de Simon Coutu sur Mondialisation.ca, Le 23 juillet 2008 :

Une vingtaine de cadets vêtus de l'ancien uniforme vert olive de l'armée canadienne sont couchés sous une tente dans un champ de tir, carabine de calibre 22 à la main. Appuyés sur un sac de sable, ils visent une cible placée quelques mètres plus loin. Une instructrice leur crie: «Relève! Pour un tir de 10 balles! Lorsque vous serez prêts, feu!»

Antoine Rivière, 14 ans, atteint la cible à tous les coups. Le garçon de Lévis a le crâne rasé et mesure un peu plus de quatre pieds. Il est fier de sa performance.

«C'est rare que ça m'arrive. Après les cadets, j'aimerais entrer dans la réserve de l'armée. J'aime avoir du fun en gang et j'adore la discipline et les ordres.»

Antoine fait partie des 2000 jeunes de 12 à 18 ans qui participent à un camp d'été des cadets de l'armée de terre sur la base militaire de Valcartier. Le plus gros rassemblement du genre au Canada. Ils prennent part à toutes sortes d'activités: exercices de survie dans les bois, escalade, jeux de cordes dans les arbres et maniement de carabine.

Dans le champ de tir, Mélissa Leroux, 13 ans, a manifestement de la difficulté à manier son arme. Lorsque vient le temps de voir son résultat, elle remarque que sa cible est restée vierge. «C'est la première fois que je tirais de la vraie carabine, dit-elle. J'étais vraiment stressée.»

Comme beaucoup d'adolescents rencontrés par La Presse à Valcartier la semaine dernière, elle aimerait grossir les rangs des Forces armées canadiennes. «Je veux être une infirmière plus tard. J'aime les cadets parce que c'est autoritaire, dit-elle. Avant de m'inscrire, j'avais beaucoup d'amis. Maintenant, je suis encore plus populaire!»

Un peu partout sur la base, des adolescents marchent en rang en balançant les bras à la manière militaire: «Gauche, gauche! Gauche, droite, gauche!» Sarah Boulanger, 14 ans, est persuadée que son expérience dans les cadets lui donnera plus de chances de devenir militaire. «Aussitôt que je le peux, je m'enrôle. Tirer, c'est ma passion! À la maison, j'ai une carabine 22 et je me pratique sur une cible.»

Devenir un bon citoyen

L'officier des affaires publiques des cadets au Québec, le major Carlo De Ciccio, affirme que les activités de tir se font dans un cadre sportif. «On se base sur les normes olympiques. Les cadets représentent une pépinière d'athlètes de biathlon. On leur donne la chance de tirer avec des armes qui ont plus de précision, avec l'expertise des Forces canadiennes.»

Il croit qu'il est parfaitement normal de donner des armes à des mineurs si les manipulations se font dans un cadre sécuritaire. «Pour les gens de la ville, ça peut paraître étrange, mais c'est courant en région. Savoir manipuler une arme fait partie des choses qui font des cadets de meilleurs citoyens.»

À une vingtaine de minutes du camp de base, des dizaines d'adolescents s'amusent dans un immense jeu de cordes installé dans les arbres. Les jeunes montent à une douzaine de mètres à l'aide d'échelles et de tyroliennes. Au pied des arbres, sur le bord d'un grand lac, les cadets attendent tranquillement que leurs confrères terminent leurs manoeuvres. La Presse leur a demandé s'ils étaient intéressés à grossir les rangs de l'armée. Onze des 12 adolescents ont levé la main.

Seule Samanta Goyer n'a pas l'intention de s'enrôler. Plus tard, la cadette de 16 ans aimerait devenir une intervenante sociale. «Les jeunes se confient à moi, dit-elle. J'adore m'occuper d'eux.»

Le major Carlo De Ciccio précise qu'il n'y a aucun recrutement militaire chez les cadets. Il ajoute toutefois que les jeunes savent davantage à quoi s'attendre s'ils deviennent des recrues de l'armée. «Ils apprennent à cirer leurs bottes, repasser leur uniforme, faire le drill militaire et leur lit. Ils sont au courant des défis qu'ils auront à relever.»

Au fond du bois, un groupe de jeunes garçons s'affaire à monter une tente, au milieu d'un nuage de moustiques. Ils chantent «Oui, c'est nous le peloton 13!» sur l'air de We Will Rock You de Queen. Ce sont de vrais guerriers. Link Chevalier, 14 ans, est un Gaspésien passionné des armes. «Je suis entré dans les cadets parce que j'avais envie de tirer, dit-il. Je suis même le meilleur tireur de mon corps de cadets!»

Un garçon blond, Patrick Delamarre, 14 ans, se mêle à la conversation pour manifester son amour de l'univers militaire. «J'aimerais avoir un métier dans l'armée. Il y a des règles à respecter, mais c'est le fun quand même. Mon rêve est de devenir tireur d'élite. J'aimerais aussi conduire des jets et des tanks!»

Lire également l'article de Normand Beaudet: Les enfants soldats de l'armée canadienne.

mardi 29 juillet 2008

Les Bélugas du St-Laurent : 2/5

Les Bélugas sont des mammifères marins mesurant de 3 à 4,5 mètres, pour un poids de 0,7 à 1,5 tonnes. Il s’agit d’un cétacé à dent de la même famille (Monodontidae) que les narvals. Prenant plusieurs teintes allant du brun au bleu et au gris avant leur maturité, ces petites baleines deviennent par la suite d’un blanc très clair et caractéristique de l’animal. Celles-ci sont davantage retrouvés en eau arctique et subarctique, au nord du Canada, de l’Alaska et de la Russie, et leur population du St-Laurent en est la plus méridionale (au sud). Isolés dans ces eaux depuis plus de 10 000 ans, ceux-ci ont maintenant une signature génétique distincte de leurs compagnons du Nord.

Ces baleines blanches du St-Laurent fréquentent principalement l’estuaire moyen et maritime du St-Laurent, une partie du Fjord du Saguenay et le Golfe du St-Laurent, qu’elles occupent surtout l’hiver. Quelques sites du St-Laurent sont connus comme aire de mise-bas (pouponnières) dont la Baie Ste-Marguerite dans la rivière Saguenay et les abords de Cacouna, que la construction d’un port méthanier menace gravement.

Les femelles peuvent accoucher d’un veau tous les 3 ans, après une période de gestation de 12 à 15 mois. Celles-ci, accompagnées de leurs progénitures, préfèrent les baies protégées et les embouchures de rivières.

Les Bélugas se nourrissent de poissons de longueur de 10 à 20 cm, comme le hareng et le capelan, en plus d’invertébrés marins qu’ils retrouvent au fond de l’eau. Ils peuvent plonger jusqu’à 800 mètres de profondeur. Les dernières données disponibles sur leur longévité l’établissent à 60 ans.

Les Bélugas sont très grégaires dans leurs déplacements et activités quotidiennes. Ils se dirigent et trouvent leurs proies sous l’eau grâce à une sorte de baril d’huile dans la tête, le melon, dont les vibrations lui servent de radar très précis (écholocation). Ils sont dotés du plus grand répertoire vocal chez les cétacés, soit une des raisons pour laquelle on le nomme également le « Canari des mers ». Ces baleines peuvent émettre un large éventail de sons et bruits, dont des meuglements, des sifflements, des cliquetis, des gargouillements, des caquètements, des aboiements, etc…

Les Cadets Royaux de l’armée canadienne

"Le Bureau des cadets refuse obstinément de reconnaître son mouvement comme un organe de recrutement des Forces canadiennes. Il souligne que ce "Mouvement jeunesse VOLONTAIRE" n'est pas un mécanisme de recrutement, mais un outil CIVIL permettant aux jeunes "de se familiariser avec les Forces Canadiennes", et qu'il y a là une importante nuance. A ce jour, les informations recueillies par notre équipe de travail ne permettent pas de reconnaître cette nuance:

- L'armée finance ce "Mouvement d'intéressement à l'armée" à coup de près de 200 millions de $ par année. Pour peu dire que l'intérêt des Forces pour ce "mécanisme d'intéressement" est manifeste.

- L'armée finance les diverses Ligues de cadets, ces fondations qui rendent prétendument le mouvement civil. Revenu Canada considère les Ligues de cadets comme étant des organismes de charité, et les autorise à émettre de reçus pour exemption d’impôts. Cette réalité permet aux Corps de cadets de ramasser des fonds qui servent souvent à financer des activités de sensibilisation aux Forces Canadiennes (participation à des spectacles aériens, événements naval, visite de musés militaires, parades militaires, compétitions de fanfares, compétitions de tir, etc....).

- L'armée fournit et finance toute une gamme d'infrastructures et d'équipements, tant pour l'entraînement régulier des cadets dans les écoles pendant l'année scolaire, que pour les camps d'été.

- L'armée fournit les infrastructures administratives pour les "Bureaux des cadets", qui gèrent souvent le mouvement à partir de bases militaires. Les commandants régionaux des cadets sont des militaires de carrière qui
relèvent de l’autorité du Quartier Général de la Défense Nationale.

- Les activités de plusieurs Corps de cadets dépendent d'un soutien et d'un lien étroit avec leur unité de réserve régionale et en porte aussi leurs couleurs, badges et nom de régiment.

- L'armée fournit les uniformes, calqués sur chacune des uniformes des trois forces: Cadets de l'air, de la Marine et de l'armée de terre.

- La structure hiérarchique des cadets provient de celle de l'armée, tant pour les cadets eux même, que pour leurs instructeurs.

- Les forces de réserve de l'armée inspirent le fonctionnement des Corps de cadet au cours de l'année scolaire: l'horaire et le contenu des formation sont similaires, à l'exception des notions de combat.

- Les forces régulières de l’armée inspirent le fonctionnement des camps estivaux des cadets qui se font sur des bases militaires. On reproduit le quotidien des " vrais de vrais militaires" grâce aux infrastructures et à une gamme d’équipements mis à la disponibilité des jeunes. Les jeunes en camp de vacance, s’acclimatent au quotidien de la vie sur une base.

- Comme pour les militaires, le cadet se familiarisent avec les armes à feu, apprennent à en prendre soin, à la monter, à la démonter, il y a même des compétitions du genre. Certains cadets participent à des compétitions de tir et, deviennent "tireurs d'élite", comme c'est le cas pour les "snipers" de l'armée. Ultimement, comme le militaire, l’enfant intègre l'idée que sa vie peut dépendre de son arme.

- Les entraîneurs des cadets, qui font parti du Cadres des instructeurs cadets, étaient considérés comme membres de la réserve jusqu'en 2006. Dorénavant, ils sont considérés comme faisant partie de "la cinquième
branche des Forces Canadiennes". C’est une question de sémantique, ils sont toujours rémunérés par les Forces Canadiennes, en fonction d'échelles salariales similaires, bénéficient des mêmes gammes de bénéfices et on
réfère aux mêmes mécanismes d'ancienneté et de hiérarchie que dans l'armée régulière.

En somme, tout comme les militaires, les cadets portent l'uniforme militaire, sont soumis à la hiérarchie militaire en étant conditionnés à obéir au doigt et à l'œil (drill), simulent les missions armées que mènent les véritables soldats (scheme), sont en contact avec une panoplie d'équipements de combat (TTB, Tanks, fusils d’assaut) et apprennent même de façon limité, le maniement des armes. Plusieurs cadets soulignent l'importance de cette discipline prétendument volontaire.

Pour la majorité de la population, tout comme pour nous, malgré les centaines de protestations reçues, il est très difficile de voir en quoi cet organisme jeunesse peut être indépendant de l'armée. Pour ce qui est de la différence, qui selon les membres du mouvement est ÉNORME entre un "mécanisme d'intéressement" et un "mécanisme de recrutement" de l'armée, nous vous laissons le soin de porter vos propres conclusions.

Les prétendues nuances relèvent beaucoup plus de la novlangue Orwellienne utilisée par l’armée, que d’une réalité factuelle."

Campagne d'opposition au recrutement militaire

samedi 26 juillet 2008

Un message de la communauté Algonquine du Lac Barrière

Lu sur Solidarité Lac Barrière :
"« Nous, le peuple traditionnel de Lac Barrière, avons depuis toujours vécu selon notre droit coutumier que nous avons codifié comme notre Mitchikanibikok Anishinabe Onakinakewin (Code de Gouvernance Coutumier du Lac Barrière). Ceci est ce que nos arrière-grands-parents nous ont légué, ainsi qu‘à nos enfants, nos petits-enfants, et les générations qui suivront. Notre responsabilité est d'assurer que notre droit coutumier soit toujours respecté et protégé.

Notre Festin sert de remerciement pour ce avec quoi nous nourrissons nos familles, les aliments qui proviennent de nos terres et rivières. Le Wampum à Trois Cordes est un symbole d'amitié avec nos Frères et Sœurs, les enfants, et tous les êtres vivants. Ceci est la base de nos enseignements. Nous avons une grande responsabilité : Protéger nos terres, protéger nos animaux, poissons et oiseaux. Défendre notre mode de vie de chasseurs afin que nos enseignements et notre Festin puissent continuer à exister pour nos enfants, petits-enfants, et les générations qui suivront avec notre langue et nos croyances.

Aujourd'hui, en tant que communauté traditionnelle, nous luttons pour défendre notre droit coutumier contre des violations de la part d'individus qui ne les respectent plus, ainsi que la manière dont nous nous gouvernons. Nous honorerons ce que nos arrière-grands-parents nous ont légué. Personne ne prendra notre droit coutumier pour s'allier avec le gouvernement fédéral afin de s'enrichir et compromettre nos droits et intérêts.

Notre droit coutumier est sensé nous aider à vivre en harmonie avec la nature et entre nous-mêmes. Ce n'est que quand des individus vivants au sein de notre communauté violent et font fi de nos coutumes que l'harmonie est rompue.

Malgré des avertissements répétés de cesser, une faction dissidente continue de violer et de faire fi de nos coutumes et a brisé l'harmonie de notre communauté. Ainsi, le 4 Mars 2008, la majorité des membres éligibles de notre communauté de Mitchikanibikok ont confirmé que nous n'accepterions pas que ces dissidents restent au sein de notre communauté. Maintenant le gouvernement fédéral essaie de nous les imposer en utilisant la Sûreté du Québec pour les ramener dans notre communauté.

Le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec veulent remplacer notre Chef et conseil coutumier parce que nos leaders exigent qu’ils honorent les ententes qu’ils ont conclues avec notre Première Nation.

Les ententes avec le gouvernement fédéral sont:
• L’Entente trilatérale de 1991.
• Le Protocole d’intention réciproque et l’Offre globale de reconstruire note communauté de 1997.
• Les dispositions spéciales stipulées dans notre Entente de contribution jusqu’à la venue d’un tiers administrateur qui les a enlevées.

Les ententes avec le gouvernement du Québec sont:
• L’ Accord bilatéral de 1998 et la mise en oeuvre des Recommandations conjointes adoptées par le négociateur du Québec, John Ciaccia, et notre négociateur, Clifford Lincoln, notamment le paiement annuel de 1.5 million de dollars à notre Première Nation en partage des recettes.

Le gouvernement fédéral tente d’imposer une faction dissidente minoritaire à notre Première Nation dans le but de se libérer des obligations qui lui reviennent en vertu des ententes signées avec notre Première Nation. C’est une répétition de ce qu’il a tenté de faire en 1996-97.

Appel à l'appui

Nous sommes à la recherche de groupes et d’organismes pour appuyer la liste de demandes de la communauté. Si vous aimeriez le faire contactez barrierelakesolidarity @gmail.com

LISTE DE DEMANDES DES ALGONQUINS DU LAC BARRIERE

1. Que le Gouvernement du Canada accepte de respecter le résultat d’un nouveau processus de sélection de nos dirigeants avec des observateurs de l’extérieur, qu’il reconnaisse le nouveau chef du Conseil de bande et qu’il cesse toute ingérence dans la gouvernance du Lac Barrière.

2. Que le Gouvernement du Canada accepte d’inclure immédiatement un programme de langue et de culture algonquine au programme de l’école primaire.

3. Que le Gouvernement du Canada respecte les ententes signées avec le Lac Barrière, y compris l’entente tripartite, le Mémoire d’entente mutuelle et les dispositions spéciales, auxquelles il a mis fin illégalement.

4. Que le Gouvernement du Canada abroge le système de gestion par des tiers, qu’il a imposé injustement au Lac Barrière.

5. Que la Province de Québec respecte les ententes signées avec le Lac Barrière. Incluant l’entente tripartite de 1991 et les ententes bilatérales de 1998, et qu’il mette en application les recommandations bilatérales de Ciaccia-Lincoln, incluant la contribution annuelle de $1,5 millions en partage du revenu des ressources.

6. Que le Gouvernement du Canada et la Province du Québec amorce une enquête judiciaire sur la façon dont le bureau régional du Québec du ministère des Affaires Indiennes traite le Lac Barrière et les autres Premières Nations qui voudraient y être inclus.

7. Que le Gouvernement du Québec, en consultation avec les Premières Nations, examine les recommandations de la Commission IPPERWASH en Ontario à titre d’exemple pour améliorer les relations Québec-Premières Nations et les procédures de la Sûreté du Québec dans son rôle de police des communautés des Premières Nations."

mercredi 23 juillet 2008

Il y a maintenant 130 ans : La Commune de Québec

Voilà un bout d'histoire qui ne risque pas d'être au programme des fêtes bourgeoises du 400ième et qui continue d'être boudé par "l'histoire officielle". Le passé construit le présent et le futur dit-on, encore faudrait-il pouvoir connaitre ce qui se passait réellement, au delà de l'endoctrinement des puissants et du parasitisme du système établi.


Lu dans Le Devoir du 30 mai :

Québec au printemps 1878: crise constitutionnelle et émeute communiste - Une page reléguée aux oubliettes de l'histoire

Yvan-M. Roy, Avocat

Édition du mercredi 30 mai 2007

Le 26 mars dernier, les électeurs du Québec se sont donné un gouvernement minoritaire. Une telle situation ne s'était pas vue depuis 1878, quand une grève générale avait brouillé le contexte politique. La capitale avait alors été paralysée pendant dix jours. Les grévistes harangués par des agitateurs venus d'Europe s'étaient mis en marche derrière le drapeau rouge. La troupe avait mis fin aux troubles à coups de sabre et de fusil. Retour sur cette page d'histoire.

La crise constitutionnelle

Le 2 mars 1878, ayant refusé l'adoption par le Parlement d'une loi sur le chemin de fer, le lieutenant-gouverneur Letellier de Saint-Just avait destitué le premier ministre de Boucherville, un conservateur. Le 8 mars suivant, Letellier avait appelé Henri-Gustave Joly, de l'opposition libérale, à former le cabinet. La situation devint intenable et des élections générales eurent lieu le 1er mai. Les conservateurs, maintenant dirigés par Joseph-Adolphe Chapleau, firent élire 32 députés, les libéraux 31. Restaient cependant deux conservateurs indépendants, qui se rallièrent aux libéraux. Letellier appela Joly à former le gouvernement. Furieux, les conservateurs parlèrent de crise constitutionnelle. Le 4 juin, les chroniqueurs parlementaires décrivirent l'ouverture houleuse de la quatrième législature, ceux de Québec dans les pages du Canadien, ceux de Montréal dans celles de La Minerve.

Grève, parades et fermeture de chantiers

À la crise politique vint s'ajouter une crise sociale d'envergure. Le jour même où s'ouvrait la joute parlementaire, des journaliers employés à la construction des nouveaux édifices du gouvernement s'unirent pour protester contre leurs «salaires de famine». L'entrepreneur Cimon, qui dirigeait les travaux, fut chassé du terrain sous une grêle de pierres. Le lendemain, les grévistes paradèrent dans les rues de Québec, empêchant les employés des travaux publics de vaquer à leurs occupations. Ils firent également cesser le travail au chantier du chemin de fer de la rue Saint-Jean.

Le 7 juin, une nouvelle parade se mit en branle en début d'après-midi, drapeau rouge et bleu en tête avec chansons de circonstance. Les ouvriers s'arrêtèrent aux bâtisses du parlement pour demander au premier ministre Joly d'être payés 1 $ par jour au lieu de 50 ¢. Au nom de l'entrepreneur, le premier ministre leur proposa une augmentation de 20 ¢, ce que les grévistes refusèrent.

Le soir du 9 juin, le premier ministre fut attaqué sur la rue après l'ajournement de la Chambre. Heureusement, il fut secouru par des amis. La rumeur courut que ses assaillants étaient issus du groupe des grévistes venus le voir au parlement deux jours plus tôt. [...]

Deux jours plus tard, les grévistes se réunirent en grand nombre. Après avoir écouté le discours d'un de leurs chefs, ils se mirent en marche. Au nombre de 700, ils visitèrent les usines du Chemin de fer de la Rive-Nord. Après une vive discussion avec le contremaître, ils se mirent à démolir les portes et les fenêtres de l'établissement.

Ils se rendirent ensuite à la fabrique d'allumettes Paré sur la rive de la rivière Saint-Charles. Ils fermèrent l'établissement en causant beaucoup de frayeur «aux filles» et aux autres employés. Ils firent de même au moulin Roche, dans le secteur de l'anse aux Foulons. Ils lancèrent des pierres à la police riveraine, blessant sérieusement cinq policiers. [...]

Durant la nuit du 12 juin, plusieurs navires furent remorqués du côté sud du Saint-Laurent pour être déchargés par les journaliers de Lévis. Au petit matin, des miliciens volontaires venus de Montréal commencèrent à débarquer pour prêter main-forte aux autorités. Sauf quelques exceptions, les manufactures de Québec demeuraient fermées.

Communistes parisiens et drapeau rouge

En matinée, 2000 grévistes étaient assemblés dans le quartier Saint-Roch. La Minerve rapporte une nouvelle surprenante: «Parmi les meneurs étaient plusieurs communistes parisiens. La populace a paradé dans les rues ce matin avec drapeau rouge en tête.»

Des citoyens alarmés firent chercher en vain le maire Robert Chambers pour qu'il proclame la loi sur l'émeute et autorise la troupe à disperser les séditieux. Finalement, la batterie B, seul corps militaire régulier de la capitale, fut dépêchée sur la scène des désordres. Sans proclamation de la loi de l'émeute, les militaires ne pouvaient pas utiliser les armes. Les soldats furent obligés de retraiter à la halle Jacques-Cartier sous une grêle de cailloux et de projectiles de toute sorte. Le capitaine Prévost et quelques soldats furent gravement blessés.

Le journaliste de La Minerve écrivit: «La populace s'est rendue maître de la ville et personne ne s'intéresse aujourd'hui à la politique.» La grève avait pris des proportions alarmantes. L'entrepreneur Cimon fit savoir qu'il se proposait d'intenter une poursuite contre la Ville de Québec parce que l'apathie des autorités ne l'avait pas protégé contre les émeutiers. Le Canadien, journal conservateur, trop occupé à dénoncer la crise politique, ignorait l'évolution de l'émeute.

Quittant Saint-Roch, les grévistes prirent la direction du port. Ils prirent d'assaut les magasins de M. Renaud, rue Saint-Paul. Ils s'emparèrent de 200 barils de farine. Toutes les voitures sur place furent réquisitionnées et les charretiers contraints de porter les barils dans les quartiers ouvriers.

Fusillade, charge au sabre et frayeur populaire

Au début de l'après-midi, les militaires prirent position sur la rue Saint-Paul, près des magasins Renaud. Le maire proclama enfin la loi de l'émeute. De nouveau la cible de pierres, les militaires ouvrirent le feu à 14h30. Ils commencèrent à tirer avec des cartouches à blanc, puis le colonel Strange commanda le feu avec de vraies balles. Au pied de la côte du Chien (côte Dambourgès), Édouard Beaudoire, de nationalité française, s'était penché pour ramasser une pierre. Le jeune homme reçut une balle qui lui fracassa le crâne. D'autres furent blessés. Plusieurs s'enfuirent, mais la foule des spectateurs demeura imposante.

À la Haute-Ville, le huitième bataillon des Voltigeurs reçut l'ordre de mettre les armes de l'arsenal en sûreté à la Citadelle. Les soldats de la batterie B prirent position autour du parlement afin de prévenir une attaque des émeutiers. La Minerve rapporta: «La ville est plongée dans le plus grand émoi. Plusieurs personnes de la rue Saint-Paul sont tombées malades de frayeur.»

Les émeutiers se regroupèrent, tentèrent sans succès de détruire le moulin Peters, puis montèrent en groupes à la Haute-Ville afin de s'en prendre à M. Cimon, qu'ils ne réussirent pas à trouver. La cavalerie accéda à la Haute-Ville par la côte de la Montagne afin de bloquer le chemin à la foule en colère. La charge fut donnée à grands coups de sabre. Plusieurs émeutiers furent blessés. [...] Après examen, un seul émeutier, nommé David Giroux, fut retenu captif.

Le maire de Québec pris en chasse

Peu avant 20h, une partie des émeutiers se présenta à la résidence du maire Chambers pour le rencontrer. Comme on leur en refusait l'entrée, les émeutiers défoncèrent la porte pendant que le maire se sauvait par la porte arrière. Une fois à l'intérieur, les intrus visitèrent la maison de la cave aux mansardes en proférant des menaces aux quelques occupants demeurés sur place.

Pendant que le maire Chambers fuyait, près de 4000 hommes se trouvaient réunis à la Basse-Ville. Des discours incendiaires furent prononcés. [...] Peu avant minuit, près de mille hommes se rendirent à la prison afin de demander la libération de David Giroux. Le geôlier refusa. Ils brisèrent les fenêtres avant de se retirer.

Le 13 juin au matin, des renforts montréalais débarquèrent sans opposition au port. Le commandement militaire prit les mesures nécessaires pour empêcher tout attroupement. [...]

Une réunion populaire eut lieu à la salle Jacques-Cartier. La Minerve rapporta: «Un Français, un communiste apparemment, lui a adressé la parole, disant à la foule qu'il fallait du pain ou du sang. Il conseilla la patience, cependant, en attendant le départ des troupes.» [...]

Émeute matée

Le 14 juin, La Minerve fit le bilan des événements de la veille en annonçant que l'émeute avait été matée: «Les grévistes sont maintenant tranquillisés et sont retournés à l'ouvrage.» [...] L'intervention musclée de six régiments armés avait réussi à vaincre la volonté séditieuse de la populace. [...]

À Paris, le journaliste Alexandre Delouche de la presse catholique réagit aux événements de Québec dans un article qui fut reproduit le 19 juillet dans La Minerve. Delouche dressa d'abord un bilan de l'action socialiste en Europe dans les premiers mois de 1878. Il fit un tableau de la situation en France: «Ici, nous chantons l'apothéose du travail, et la lave révolutionnaire menace de tout engloutir.» [...]

Il présenta la situation du Canada: «Enfin, pour abréger cette énumération aussi véridique que peu réjouissante, nous regardions le Canada comme une oasis morale au milieu du chaos universel; il nous semblait que le souffle empesté de la révolte sociale ne franchirait pas la rive droite du Saint-Laurent; mais l'illusion n'est plus permise; Québec a eu ses journées! "Pillant et démolissant", dit La Minerve de Montréal, "l'émeute a été maîtrisée de la ville et, pour la réprimer, il a fallu que le sang coule!"» [...]

L'émeute de Québec de 1878 mobilisa des centaines de policiers et des milliers de miliciens. Le premier ministre du Québec et le maire de la capitale furent physiquement menacés. Le travail et le capital s'opposèrent radicalement sur fond de crise politique. Des dommages considérables furent causés aux propriétés. L'émeute fut reléguée aux oubliettes de l'histoire. On ne parlera jamais des communards de Québec. Il n'y eut, semble-t-il, aucun procès, aucune répression, aucune déportation. Le Nouveau Monde se révéla plus tolérant que l'Ancien Monde.


Des libertaires se sont rejoint le 15 juin à Québec sur la rue Saint-Paul pour la débaptiser en rue Édouard-Beaudoire, en l'honneur de ce ouvrier tué d'une balle dans la tête par les forces répressives. Plus d'infos...

mardi 22 juillet 2008

Les Bélugas du St-Laurent : 1/5

Il existe dans le St-Laurent des baleines complètement blanches qui y vivent à l’année. Population recluse depuis plus de 7 000 ans, les Bélugas du St-Laurent sont des mammifères marins tout à fait fascinants dont la survie est menacée. Bien que la chasse de ceux-ci se soit terminée dans les années 1970, leur population n’a pas augmenté depuis, et a stagné à près de 1000 têtes.

Littéralement décimée par l’homme, entre autres comme bouc émissaire de la baisse des stocks de poisson, cette population sans autre prédateur fait aujourd’hui face à d’autres menaces, dont certaines, comme la détérioration des milieux de vie et la pollution, touchent tout autant l’espèce humaine.

Je vous propose d’examiner plus en profondeur à travers ce dossier : les spécificités de l’animal, les menaces sur sa survie, des moyens d’actions à envisager et finalement, une perspective de réorientation de l’économie des communautés dépendantes des croisières aux baleines.

Notez bien que, par ce dossier, je n’affirme pas détenir « La » solution pour la sauvegarde de l’espèce et le développement des communautés. Je cherche tout au moins à faire une analyse de la situation et en amener des pistes pour rompre avec l’inaction.

N’hésitez pas à contribuer au sujet puisque ces textes pourraient faire l’objet d’une brochure.

mercredi 16 juillet 2008

"Profit et rentabilité" capitaliste contre conditions et dignité des travailleurs/euses

Voici aujourd'hui un texte pêché sur le site web du Syndicat des employés d'énergie électrique qui m'apparait assez instructif dans le contexte actuel. Scepter, une entreprise de Chicoutimi traitant les résidus des producteurs d'aluminium, notamment Rio Tinto-Alcan, est en grève générale illimitée depuis le 8 février 2008. Au mois de Juin, après que les travailleurs de l'usine aient rejeté massivement (94%) l'offre patronale, les dirigeants américains ont affirmé leur volonté de fermer l'usine durant les prochaines semaines. Les travailleurs/euses des entreprises tournant autour d'Alcan sont aux prises avec les logiques de Capitalisme sauvage que leur impose la multinationale et leurs conditions de travail sont menacées. Voici un texte intéressant sur le sujet, dont une section est, entre autres, consacrée au cas de Scepter.

Agissement d'Alcan face aux PME de la région Saguenay-Lac-St-Jean
- extrait de texte du: Syndicat des employés d'énergie électrique Québec

"1. ENCHÈRE INVERSÉE (ENCAN À L’ENVERS)

Explication d’un représentant syndical d’une PMO.

Encan à l’envers sur Internet : système adopté par Alcan pour saigner à blanc les PME de la région.

Qu’est-ce un encan à l’envers?

Le mot le dit bien, c’est l’envers du bon sens. C’est une nouvelle manière supposément moderne d’aller en appel d’offre. Tout d’abord, Alcan sélectionne certains fournisseurs, les informe sur le type de produit à soumissionner pour un contrat à long terme sur lesquels il faudra faire la mise et les invite à une date précise à s’enregistrer sur Internet pour participer en direct à cette forme d’encan. Les enjeux sont faussés en partant, puisque Alcan fixe le prix plancher (de départ) qui est généralement inférieur au prix actuel du marché. Certains fournisseurs, voulant avoir le contrat à tout prix par manque de commande, font baisser la mise, même si la rentabilité n’est pas au rendez-vous. D’autres le font à rabais pour démontrer dans un coup de marketing qu’ils sont très performants et très concurrentiels. Le seul véritable gagnant à court terme de cette machination infernale, c’est Alcan qui fait des économies sur le dos des fournisseurs régionaux.

À l’encontre d’une grande tradition d’affaire

En agissant de la sorte, Alcan va aussi à l’encontre d’une grande tradition d’affaire au Québec et reconnu dans le monde entier où le processus d’un appel d’offre est réalisé sous le signe de la confidentialité afin qu’aucun élément extérieur ne vienne interférer entre l’offre et le choix discrétionnaire par le client du meilleur fournisseur, tenant compte du prix, mais aussi de la qualité de l’offre. Les règles du jeu sont en train de changer complètement à Alcan depuis qu’ils adoptent graduellement l’encan à l’envers sur Internet pour faire soumissionner leurs fournisseurs qui sont aussi les PME de la région. Fini le partenariat et la croissance de fournisseurs faisant des efforts pour offrir des produits à un prix raisonnable et avec une qualité soutenue. Ce système, s’il est généralisé, conduira à la disparition de PME qui offrent des conditions de travail raisonnables à leurs employés(es), un bon programme de santé/sécurité, un système de qualité reconnu et une structure suffisamment solide pour assurer une fiabilité dans l’approvisionnement.

Comportement sans aucune éthique

Ce type d’encan va favoriser à court terme des fournisseurs qui veulent fabriquer pour Alcan à un prix toujours en deçà du prix du marché, mettant en péril la survie de leur entreprise à moyen et à long terme et éliminera graduellement les entreprises bien établies. L’encan à l’envers, c’est purement et simplement une exploitation à outrance de nos PME et un système dévalorisant qui s’inspire d’un comportement capitalisme débridé, sans aucune éthique, totalement inacceptable d’une multinationale qui profite allègrement de nos ressources régionales.

Nous devons créer un grand mouvement de protestation, impliquer différents organismes, afin de faire pression pour que cesse ce système régressif et de mouroir pour PME et qui aura des conséquences graves pour nos petites entreprises génératrices de bons emplois.

Problèmes syndicaux

L’encan à l’envers a comme conséquence de mettre en péril plusieurs PME régionales syndiquées, la perte d’emploi ou la diminution des conditions des travailleurs.

Exemple: Contrat de 800 000,00 $ (récupération) :

Coût de main-d’oeuvre (entreprise syndiquée de 25 personnes) : 920 400,00 $
Coût de main-d’œuvre (entreprise non-syndiquée de 25 personnes : 572 000,00 $

Il devient difficile pour une entreprise syndiquée de rivaliser.

Dans l’octroi de tels contrats, Alcan ferme les yeux sur des éléments (sécurité, qualité, etc.) et ne considère que le coût à court terme; l’entrepreneur ne peut expliquer sa stratégie, son expertise, etc.

Alcan est membre de Quadrem (USA) qui est composé des 21 plus grandes entreprises des secteurs minier, minéralogique et métallurgique. Le programme " Partner connect " permet de mettre en contact les acheteurs et fournisseurs.
Le discours public d’Alcan est contraire à la réalité; c’est le retour du capitalisme sauvage (américanisation). Fini le partenariat! Certaines entreprises vont participer à l’encan et soumissionner à perte pour mettre le pied chez Alcan.

Ceux qui écopent en première ligne, sont les travailleurs qui travaillent à petit salaire, sans sécurité d’emploi et dans des conditions de travail déplorables.
En 2002, une levée de bouclier de l’ACQ avait permis de mettre à jour les agissements d’Alcan; trois entrepreneurs ont refusé ce type d’enchère. Ça n’a pas duré.

L’encan à l’envers d’abord utilisé pour les contrats de construction s’est étendu au contrat annuel d’entreprises non spécialisées et depuis peu, aux entreprises spécialisées (ateliers d’usinage, etc.), ayant des contrats renouvelables depuis des années.

Une conséquence est la création d’entreprises " champignon " non-syndiquées qui font des affaires pendant 1 ou 2 ans et qui ferment leurs portes, ajoutant à la précarité des emplois régionaux.

Une autre conséquence à moyen terme est l’octroi de contrats à l’extérieur de la région.

Onze (11) contrats auraient été donnés selon l’enchère inversée en 2003 et Alcan veut augmenter le nombre à vingt (20) en 2004.

Selon le responsable des achats Alcan (Bruno Bouchard), c’est la nouvelle façon de faire face à la mondialisation. Pour lui, dix (10) PME naissent et s’éteignent chaque jour dans la région; on fait ce qu’on a à faire, dit-il, " arrangez-vous " ..."

- Syndicat des employés d'énergie électrique Québec

dimanche 13 juillet 2008

La grève de 1941 à Arvida

La grève des travailleurs de l’Alcan à Arvida, déclanchée spontanément le 24 juillet 1941, présente une lutte acharnée des ouvriers qui, malgré l’interdiction gouvernementale et les accusations de sabotage de production de guerre, firent résonner haut et fort leurs revendications par l’action directe et gagnèrent l’appui de la population locale. Des rumeurs précédant la grève jusqu’à l’envoi des militaires pour forcer le retour au travail, revoyons en détails ces événements qui se sont passés pas loin de chez nous en commençant par leur contexte.

Ça se passe durant la 2ième guerre mondiale, la grève est alors déclarée illégale par le gouvernement canadien pour l’effort de guerre et le pays passe à l’Économie de guerre. L’usine d’Alcan à Arvida est la plus grande usine d’aluminium au Canada, un métal grandement nécessaire à la production de l’armement et dont dépend particulièrement la Grande-Bretagne. Après de nombreux investissements étrangers dans l’usine d’Arvida, notamment par les britanniques, la production annuelle d’aluminium passa de 30 000 tonnes à l’ouverture de l’usine, en 1926, à 100 000 tonnes au début de la guerre (1). De plus, avant 1939, l’Alcan avait également produit pour le Japon, les États-unis, la Russie (en 1938) et même pour l’Allemagne. Les années de la guerre furent marquées de très importantes augmentations de la capacité de production de l’usine et la cadence y fut infernale pour ceux qui y travaillaient.

D’autre part, la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean est qualifiée de berceau du syndicalisme catholique par plusieurs historien(ne)s. Son premier syndicat, la Fédération ouvrière de Chicoutimi, fondé en 1907 par Mgr Eugène Lapointe, était très encadré par l’église et le principal employeur de la région, Julien-Édouard-Alfred Dubuc. Ce syndicat rejetait toute grève et son organisation était fortement hiérarchisée, ne laissant pas de place aux travailleurs souhaitant lutter pour l’amélioration ou la défense de leurs conditions. Il était géré par un Conseil de direction rassemblant des membres honoraires. Les ouvriers gardèrent une certaine méfiance envers les structures du syndicat, qui sera remplacé en 1912 par la Fédération ouvrière mutuelle du Nord, un syndicat encore catholique mais davantage concentré sur les besoins des travailleurs, qui se partagera leur affiliation avec les syndicats internationaux (2). Ce n’est toutefois qu’en 1936, dans les difficultés économiques de la Grande Dépression, qu’est né le premier syndicat de l’usine d’Arvida (3). Malgré une première convention collective négociée en 1937, de fortes tensions et disparités demeureront jusqu’à l’éclosion de la grève en 1941.

Pour en revenir à cette grève, selon les témoignages de plusieurs travailleurs, le débrayage avait été planifié au moins depuis la veille (4) dans la mesure où les travailleurs de la salle de cuve #48 pourraient participer au mouvement et que s’en suivrait un effet d’enchaînement dans les autres salles de cuve. Il semble que des rumeurs de grève circulaient depuis un certain temps et que les travailleurs avaient déjà menacé à quelques reprises de faire la grève. De plus, elle était devenue un sujet de conversation courant à la pause du midi entre les travailleurs.

Diverses causes d’ordre continues et momentanées poussèrent les travailleurs à agir sur leurs conditions. D’abord, la mésentente régnait déjà dans les relations qu’ils entretenaient avec le syndicat et les directeurs anglophones de l’usine. Plusieurs employés étaient restés insatisfaits de la convention collective négociée et réclamaient un salaire plus élevé, l’abolition des primes au rendement et l’embauche de plus d’ouvriers pour les salles de cuve. L’autorité des contremaîtres était également discutée. Et puis, dans la semaine du 21 juillet, quelques facteurs d’ordre momentanés menèrent leur colère au point d’ébullition. En effet, sur leur paie de la veille, les déductions avaient fortement augmentées pour la Défense nationale et le premier prélèvement de l’assurance-chômage. De plus, la semaine fut marquée par des températures de canicule, de 27,5°C le 21 jusqu’à 34,7°C le 24. S’ajouta à ces causes des émanations de dioxyde de carbone et de fluorine. Sous ces conditions, plusieurs travailleurs s’évanouirent au travail durant la journée du 24. Ceux-ci soustraient aux équipes de salles de cuve, la charge de travail de leurs compagnons de travail augmenta d’autant plus.

Le 24 juillet 1941, 700 travailleurs des salles de cuve d’Arvida déclanchèrent spontanément une grève sauvage au changement de quart de 16h et occupèrent l’usine. Le syndicat devint rapidement inquiet de la situation, puisque totalement en dehors de son contrôle. Quand, du côté de Montréal, le Président d’Alcan, R.E. Powell, apprit la nouvelle, il appela à son tour Clarence Decatur Howe, le Ministre des Munitions et Approvisionnement (5), qu’il connaissait personnellement (6) et qui revenait justement d’une des usines d’Alcan, pour lui demander d’intervenir.

Au Saguenay, la population locale se montra rapidement solidaire avec les revendications des travailleurs. La grève atteignit 4500 travailleurs le lendemain et près de 8000 le 3ième jour.

À partir de prétendues rumeurs, Howe, qui se disait ouvertement contre les syndicats, affirmera bientôt au Premier ministre, Mackenzie King, qu’il s’agissait d’« un homme qui était venu des États-Unis, et qui parlait différentes langues, s’était introduit dans l’usine, et avait agité les gars » (7), afin de motiver une éventuelle répression de la grève. Face aux hésitations et réticences du Premier ministre et de ses collègues de Cabinet, Howe menaça de quitter son poste s’il ne pouvait obtenir le pouvoir de faire intervenir l’armée pour contrôler les travailleurs du Saguenay (8). Pendant ce temps, dans les cuves de l’Alcan, le métal se solidifiait, provoquant une grande perte de l’aluminium stratégique de la Grande-Bretagne dont le Canada s’était engagé à protéger. D’ailleurs, le Ministère des Munitions et Approvisionnement avait été créé sous Howe pour protéger l’approvisionnement des Alliés, peu importe le prix qu’il pouvait en coûter.

La presse anglophone s’outrera particulièrement de ce, qu’à partir des déclarations du ministre Howe, sera appelé « une trahison de la part de l’ennemi ». Au Québec, Le Soleil dénoncera l’utilisation de la situation par Howe pour prendre le pouvoir d’envoyer les militaires afin de réprimer des grévistes. Adélard Godbout, le premier ministre du Québec d’alors, affirmera que la Sûreté du Québec à elle seule pouvait mater le vent de révolte chez les travailleurs. En accusant la grève d’acte de sabotage de production de guerre et de trahison, C. D. Howe réussira à faire adopter un décret par le Cabinet pour l’intervention de l’armée en cas de sabotage d’usines de guerre.

Le 27, deux compagnies de soldats de Valcartier arrivèrent sur les lieux (9), équipées de mitrailleuses et de chars d’assaut et accompagnées de 400 policiers de la Sûreté du Québec. Une assemblée locale fut tenue par les travailleurs durant laquelle le support à la grève fut de : 453 pour et 51 contre.

Le 28, un peu après que le maire d’Arvida, Louis Fay, ait lu la « Loi de l’émeute » (10) devant l’usine, les militaires pénétrèrent à l’intérieur. Il y eut d’abord un peu de bousculade, mais les grévistes décidèrent de lever l’occupation pour éviter la confrontation et poursuivirent le piquetage à l’extérieur. La grève se termina le 29 juillet vers 16 heure et les ouvriers reprirent le travail, forcés par l’intervention de l’armée et de la SQ.

Cette grève a été victorieuse sur quelques points. Les conditions de travail et le salaire furent significativement amélioré(e)s. La lutte menée par les ouvriers renforça la cohésion sociale à Arvida. Aucune arrestation ou mise à pied n’eut lieu en lien avec la grève et aucun équipement de travail n’a été brisé durant l’occupation des travailleurs. Les enquêtes de la Gendarmerie Royale ne permirent de trouver pas un leader, agitateur ou sabotage.

Quelques mois plus tard, suite au plébiscite pancanadien du 27 avril 1942, qui portait sur l’imposition de l’enrôlement obligatoire au service outre-mer, le vote d’une majorité de 63,7% des canadien(ne)s sera favorable au projet de conscription. Le plébiscite eut cependant beaucoup moins d’appui au Québec, où 71,2% de la population et 85% des francophones s’y opposèrent (11). La situation fut similaire au Saguenay, où même les conseillers municipaux incitaient la population à voter négativement. Lorsque le résultat du plébiscite fut annoncé, des étudiant(e)s du Séminaire de Chicoutimi escaladèrent le bureau de poste pour y arracher et déchirer le drapeau « Union Jack » en signe de protestation (12). Un mouvement anti-conscription s’éveilla au Québec. Au Saguenay-Lac-Saint-Jean, tout comme dans les autres régions de la province, il y eut un grand nombre de déserteurs et une multitude de tactiques furent utilisées pour ne pas aller se faire trouer la peau sous les drapeaux. Les autorités recherchaient activement ces réfractaires. Dans la foulée des événements, un contingent de la Gendarmerie Royale du Canada, en quête de déserteurs, sera attaqué par une foule en colère à Drummondville. On pouvait en compter au-delà d’une dizaine de milliers au Québec (13). Ils furent amnistiés (14) en 1947, le jour suivant la fin de la guerre.





Références

1 BROUILLETTE, Benoît. « L’aluminium au Saguenay » (1946) – Les Classiques des sciences sociales
2 GIRARD, Camil et PERRON, Normand. Histoire du Saguenay—Lac-Saint-Jean, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture, 1989, 665 p.
3 SIMARD, Marianne. « Edmond Tremblay, pionnier d’Arvida », [En ligne], http://www.csjonquiere.qc.ca/ConcoursHistoire/Documents/03-Marianne Simard 3e prix secondaire.pdf
4 IGARTUA, José Éduardo. « Arvida au Saguenay. Naissance d’une ville industrielle »., p.206, http://books.google.ca/books?id=EBi9pD5e8uwC&pg=PA196&hl=fr&source=gbs_toc_s&cad=1&sig=EIgoBGdwm68u5pmEGH77bhMCsRI
5 IDEM
6 BOTHWELL, Kilbourn. « C.D. Howe », 274.
7 28 July 1941, Cabinet War Committee minutes, Howe, King papers, MG 26J-2, LAC.
8 MACFARLANE, John. Agents of control or chaos? A strike at Arvida helps clarify canadian policy on using the troops against Workers during the Second world war », The Canadian Historical Review 86, 4 Décembre 2005, University of Toronto Press
9 IDEM
10 « Sa Majesté la Reine enjoint et commande à tous ceux qui sont ici présents de se disperser immédiatement et de retourner paisiblement à leurs domiciles, ou à leurs occupations légitimes, sous peine d’être déclarés coupables d’une infraction qui peut être punie de l’emprisonnement à perpétuité. Dieu sauve la Reine. » - Loi de l’émeute
11 Université de Sherbrooke. « 27 avril 1942 – Tenue d’un plébiscite sur la conscription par le gouvernement fédéral », Bilan du siècle [En ligne], http://bilan.usherbrooke.ca/bilan/pages/evenements/694.html
12 POMERLEAU, Daniel. « Une guerre mondiale au Saguenay », http://www.legionmagazine.com/fr/index.php/2006/03/une-guerre-mondiale-au-saguenay/
13 CIFRAQS. « Chronologie de l’histoire du Canada », 20-10-2003 [en ligne], http://www.tu-dresden.de/sulcifra/quebec/geschqu/chronol.htm , consulté le 09-07-2008
14 Libérés de la sentence qu’ils avaient écopés pour désertion

samedi 12 juillet 2008

Un texte du 3 juillet de Marie-Noëlle Béland

Je me permet de publier un texte très intéressant écrit et prononcé par Marie-Noëlle Béland en ouverture de la manifestation du 3 juillet contre le défilé militaire dans les rues de Québec.

Bonjour,
Est-ce que quelqu'un pourrait me dire où est la fête ?
Il y a 100 ans aujourd'hui, des navires de guerre étaient alignés sur le fleuve et 15 000 miliciens et matelots défilaient dans les rues de Québec. C'était les fêtes du 300e anniversaire de la ville de Québec.

Aujourd'hui encore, honneurs et privilèges pour l'armée canadienne. Est-ce pour fêter la mort de 30 000 Afghanes et Afghans ? «Réjouissons-nous, ce sont 30 000 barbares de moins. » C'est ce que vous avez dit ce matin, monsieur le maire, en donnant les clés de la ville à l'armée canadienne ?

Les serpentins et les ballons pendent au bout des baïonnettes. C'est comme ça qu'on fête chez nous… Des militaires par milliers qui défilent, tambours battants, drapeaux flottants et baïonnette au canon, dans les rues de Québec pour exercer leur privilège de Droit de cité.

Grâce au 400e, le Canada a encore trouvé un bon prétexte pour faire sa propagande. Distribuerez-vous des armes aux enfants ? L'effort de guerre ça commence tôt.

Est-ce que ce midi, le repas des dignitaires sera distribué entre deux tirs de missiles ? C'est comme ça qu'on fait en Afghanistan… Parce qu'on essaie de cacher une mission guerrière derrière des opérations humanitaires, les vrais travailleurs humanitaires ont du mal à intervenir : on les confond avec l'armée.

Avec qui fête l'armée canadienne, est-ce avec la société civile afghane, ou avec les soldats états-uniens et anglais ?

J'espère qu'on a pas oublié d'inviter les nouveaux amis du Canada, ces criminels de guerre qui forment aujourd'hui le gouvernement afghan. Oubliez-vous que ces dirigeants que vous soutenez sont coupables de pillages de vols et d'assassinats et qu'ils savent aussi bien que les talibans ce qu'est un régime de terreur ?

Oh, il y a de l'argent pour la fête, ça s'est sûr… L'élite canadienne sait faire de l'argent et le gouvernement est l'ami des gens riches... C'est d'ailleurs pour eux qu'on est en guerre…. Pour ceux qui travaillent à la reconstruction de l'Afghanistan : constructeurs d'oléoducs et de gazoducs, industries aéronotiques et de pétrochimie, compagnies financières, compagnies d'armements.

Le Canada est un des plus grands exportateurs d'armes au monde et un des pays qui dépense le plus dans le domaine du militaire! C'est ça qu'on fête aujourd'hui ?


Qui sont les barbares ?
Les promoteurs d'une idéologie religieuse rétrograde, certes. Mais barbares aussi ceux qui exportent et impose un modèle social et économique trop souvent inhumains. Barbares ceux qui placent la vie bien loin derrière les perspectives de profits et l'appas du gain. Barbares les croisées de l'occidents qui aliène et sacrifie la
jeunesse au nom de la sacro-sainte guerre au terrorisme. Barbares ceux qui se taisent devant la barbarie.


Permettez-moi de croire qu'une fête n'a pas besoin d'armée.
Permettez-moi de croire en une paix qui soit tout autre que celle que défend l'armée canadienne.
Permettez-moi de croire que dans la guerre contre la guerre, la solidarité entre les peuples l'emportera sur l'oppression, l'exploitation, la violence et la barbarie.

Marie-Noëlle Béland
3 juillet 2008, Québec

lundi 7 juillet 2008

Vente de l'incinérateur de Belledune

Un communiqué de la Coalition Retour à l'expéditeur et d'Environnement Vie :
Baie-des-Chaleurs, le 7 juillet 2008 – La vente de l’incinérateur de sol contaminé de Belledune par Bennett Environmental Inc. est un aveu d’échec de la part de la compagnie. La construction de l’installation a coûté tout près de 30 millions de dollars. Pourtant la compagnie ne pourra en tirer que 2,9 millions. C’est un échec commercial flagrant.

Quand, en plus, on sait que les tests de brûlage ont révélé des déficiences majeures que le ministre de l’Environnement, Roland Haché, s’est empressé d’accepter, cela démontre à quel point l’ensemble du projet a été mal mené du début à la fin, autant par les gouvernements conservateur et libéral que par la compagnie elle-même.
« De récentes analyses scientifiques ont démontré que l’incinérateur de Bennett à Saint-Ambroise a contaminé, aux furannes, la chaîne alimentaire de cette région. Cela prouve que l’incinération pose un grand danger à la santé de la population, à l’environnement et à l’industrie des pêches de la Baie-des-Chaleurs. Le nouvel acquéreur et les gouvernements devront tenir compte de ces faits et respecter la volonté de la population de ne pas exploiter un incinérateur dangereux.», a déclaré Luc Potvin de la Coalition Retour à l’expéditeur.

L’enjeu principal est maintenant de savoir quelle est l’identité de la compagnie qui veut acheter cet incinérateur et à quoi elle le destine. L’entrée en vigueur prochainement de la nouvelle loi pour l’élimination des BPC et le plan rural adopté par la municipalité de Belledune qui permet l’incinération des BPC, des dioxines et des furannes selon les limites fixées dans l’ébauche du permis d’exploitation de l’incinérateur démontrent que les autorités politiques favorisent principalement les intérêts économiques au détriment de la santé de la population, de l’environnement et de l’industrie des pêches.

Les dirigeants de Bennett Environmental Inc. ont affirmé qu’ils ne veulent pas de compétitions afin de protéger leur marché, ce qui permet de supposer l’acheteur potentiel pourrait vouloir brûler d’autres contaminants toxiques, des déchets domestiques ou utiliser l’incinérateur à d’autres fins.

« Nous attendrons de connaître l’identité du prochain propriétaire et ses intentions avant de d’envisager les moyens que nous prendrons pour assurer la protection la santé de la population, de l’environnement et de l’industrie des pêches. Si le ministre Haché et son gouvernement libéral cherchent à protéger les intérêts économiques du nouvel acquéreur comme ils l’ont fait par le passé, nous prendrons les mesures qu’il faut pour que la protection de la santé de la population, de l’environnement et de l’industrie des pêches deviennent leur première priorité. », a affirmé Florian Levesque, d’Environnement Vie.

Pour plus d’informations au sujet de la campagne contre l’incinérateur de Bennett, prière de visiter le: http://www.baiedeschaleurs.net/

dimanche 6 juillet 2008

JEAN-SIMON GAGNÉ : Petit guide de survie à la journée du 400e

Lu sur cyberpresse.ca :
"Le Soleil
Québec
Sans le spectacle présenté devant le parlement, en fin d’après-midi, la journée du 400e anniversaire aurait constitué un four. Un authentique flop. Un vrai de vrai.


D’abord à cause de la pluie, qui tombait tellement dru que les poissons du bassin Louise auraient pu se sortir la tête de l’eau tout en continuant à respirer. J’exagère. Car si la journée a failli être vraiment assommante, c’est surtout parce qu’une partie du programme «officiel» semblait avoir été planifiée par le sergent-major d’un régiment colonial, rapatrié de l’époque victorienne.

Le salut à Champlain, les discours empesés des grosses légumes, le défilé militaire, tout cela aurait pu se dérouler en 1908, voire en 1808.

Pire encore, certaines parties du sermon prononcé par l’archevêque de Québec, Mgr Ouellet, lors de la messe célébrée à la Basilique avaient l’air empruntées au XVIIe siècle...

En dehors des historiens ultra-spécialisés, qui d’autre que Mgr Ouellet attache encore de l’importance au fait que Champlain, un protestant à l’origine, soit devenu plus ou moins catholique, au fil du temps?

Cela rappelle les théologiens qui se chamaillaient pour déterminer si Jésus pouvait être propriétaire de sa tunique. Docteur, pouvez-vous faire quelque chose?

C’est en prêtant attention aux discours prononcés hier que l’on réalise à quel point la machine était détraquée.

Par exemple, pourquoi la gouverneure générale, Michaëlle Jean, s’acharne-t-elle à citer Pauline Julien et Gaston Miron, entre deux clichés sur le Canada? Bien sûr, l’œuvre de ces artistes considérables n’est pas réservée aux indépendantistes. Mais il y a des limites. On jurerait qu’elle veut s’approprier tous les symboles indépendantistes pour les vider de leur sens.

Et que dire des allusions du premier ministre Harper aux bonnes relations avec les peuples autochtones? A-t-il déjà oublié que son gouvernement a rejeté la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, l’an dernier? Le premier ministre français, François Fillon, a fait encore mieux. Sa tirade sur l’arrivée de Champlain, dans un pays «de bois épais, sans loi, peuplé d’Indiens», aurait pu être empruntée à un livre de bandes dessinées intitulé Bécassine chez les peaux rouges.

Heureusement qu’il y avait quelques manifestants pour rappeler que nous étions en 2008. Sans eux, on pouvait se croire en visite chez les Teletubbies, dans un pays où la guerre n’existe pas et où il y a du tubbydélice pour tout le monde.

Je vous en conjure, ne dites pas que le moment était mal choisi. Ou que certains manifestants étaient mal engueulés.

À écouter les uns et les autres, il n’y a JAMAIS de moment approprié pour manifester. Ni d’endroit convenable. Encore moins de manifestants assez polis. À part, peut-être, des gens qui défileraient en complet-cravate, au fond du troisième étage d‘un stationnement souterrain situé dans une lointaine banlieue, vers 23h, un dimanche d’hiver, en scandant des slogans rédigés en alexandrins?

J’ouvre ici une parenthèse pour rappeler que lors des fêtes du 300e de Québec, en 1908, un bris d’aqueduc avait privé d’eau une partie de la ville. Et vous savez ce que les journaux de l’époque avaient rétorqué à ceux qui voulaient exprimer leur mécontentement?

Je résume. «Pas le bon moment pour nous embêter. Vous ferez cela quand la visite sera partie.»

Un petit mot sur le travail de la police antiémeute. À titre de journaliste, j’ai couvert des manifestations en Israël, en Serbie, en Irlande du Nord, au Kosovo, en Roumanie, dans la bande de Gaza et en Cisjordanie. Jamais, avant hier matin, des policiers ou des militaires n’avaient menacé de m’arrêter simplement pour avoir observé une manifestation.

S’il ne s’agissait que de ma petite personne, l’incident n’aurait guère d’importance. Sauf qu’hier, on pouvait entendre des policiers invectiver des manifestants, en utilisant des termes qu’on pourrait difficilement publier. Si ces policiers ne parviennent pas à garder leur sang-froid devant quelques dizaines de jeunes assez inoffensifs, comment réagiront-ils devant de vrais durs, durant une vraie crise?"
- Jean-Simon Gagné

samedi 5 juillet 2008

Communiqué de Guerre à la guerre suite à la manif du 3 juillet

Malgré la pluie et la police, Guerre à la guerre se faufile jusqu’à la parade

Québec, le 3 juillet 2008. – Près de 500 antimilitaristes et pacifistes ont répondu à l’appel du collectif Guerre à la guerre et ont marché dans les rues de Québec pour dénoncer la cérémonie du droit de cité, la parade militaire des Forces armées canadiennes et la mission canadienne en Afghanistan.

Malgré la pluie diluvienne et un dispositif de sécurité imposant, le contingent orange, dont l’objectif était de perturber les activités officielles de l’Armée, est parvenu à se faufiler jusqu’aux abords de la parade et à être vu et entendu par les militaires, leurs familles et leurs supporters. Regroupés autour de la porte St-Louis, les manifestants ont scandé des slogans antimilitaristes aux soldats, distribués des tracts aux passants et « gâché l’ambiance » selon plusieurs supporters peu heureux de voir que la police n’était pas parvenue à nous tenir à distance.

Le contingent vert, contingent sécuritaire accessible aux familles, a quand à lui marché sur la rue St-Jean avant de terminer son parcours à l’Hôtel de ville. À noter que le contingent vert a lui aussi été capable de se rapprocher de la parade et de lui signifier sa désapprobation.

De plus, nous tenons à souligner qu’en matinée, une quarantaine de militants antimilitaristes et pacifistes proches de notre organisation ont perturbé la cérémonie du droit de cité. En effet, ceux-ci ont bruyamment « enterré » le discours de « labeauminable » maire Labeaume et lancé des confettis dans la cérémonie.


mercredi 2 juillet 2008

De jeunes paysans sans terre occupent ''le chêne'' en France

Voici une action porteuse d’inspiration pour toute la jeunesse des milieux ruraux dont les aspirations de terre et liberté sont mises à mal par les logiques démentielles du marché. De l’autre côté de l’Atlantique, au-delà des mots, notre solidarité ne peut passer que par la mobilisation et l’organisation dans les milieux qui nous entourent.

Lu sur l'agence d'actualité A-Infos :
"Bonjour, je me fais l'écho de l'action menée par trois jeunes fermier-ère-s (Laurent, Virginie et Hervé ). Avec le soutien des agriculteurs et de la population locale, ils ont établi demeure, semé céréales et légumes, font paître leur troupeau de chèvres et leurs chevaux sur des terres appartenant à une entreprise privée ayant pour projet d'enfouir des "déchets ultimes". Sur cette ferme d'environ 50 hectares nommée "le chêne", laissée à l'abandon en attendant la validation par le préfet de l'infâme projet, sources d'eau potable, forêt de feuillus et terre arable en font encore un paradis sur terre. Ces trois héroristes n'ayant pas internet je me fais leur intermédiaire de ce moyen de communication.

Voici les faits de cette action citoyenne qui vous donneront, j'espère, l'envie d'aller les rejoindre dans leur lutte. Il reste de la place pour d'autre agriculteur ou artisant dans ce projet. Il y a un mois Laurent et Virginie achètent un terrain près de Allou (13 km de confolens) et y posent leur roulotte accompagnée de leur trois chevaux.

Ils sont vite au courant du projet d'enfouissement sur la ferme du Chêne qui remue la population locale. Une association citoyenne et le maire du village sont déjà sur le pont depuis quelques années pour faire échouer le projet.

La ferme achetée par une société privée spécialisée dans les sales besognes délivre actuellement un bail de chasse à une organisation de chasseurs de Limoges sur ces terres.

La proposition de Laurent, Virginie et Hervé d'investir cette ferme pour s'y installer comme agriculteur trouve un fort soutien de la part des agriculteurs du coin.

Le Samedi 7 juin la ferme est réinvestie. Nous sommes une vingtaine au matin devant la ferme. Pas moins de 6 tracteurs fauchent, labourent, et sement sur environ 7 hectares. Un portail est construit à l'entrée. Le troupeau d'Hervé est installé dans l'étable et la traite s'organise. Des parcs électriques sont montés pour les cheveaux et l'âne. Un potager voit le jour, des tomates et des courgettes sont plantées. Nous prenons possessions de la maison et une tambouille se prépare pour le midi.

Dans ce même jour une lettre est envoyée à la société propriétaire des lieux pour lui signifier l'occupation et lui demander un bail agricole.

Depuis la ferme reprend vie mais la lutte ne fait que commencer.


Appel à mobilisation, les terres libérées de la ferme du chêne menacée d'expulsion!

Nous, citoyens de la Terre, et paysans à la recherche de terres agricoles avons investi les terres du Chêne à Ansac sur Vienne (Propriété de la société Edisit), depuis le samedi 7 juin 2008.
Pourtant situé dans une zone humide où la qualité de l'eau reste exceptionnelle,ces 50 hectares de terres agricoles inexploitées depuis 6 ans sont destinées à un centre de traitement et de stockage des déchets. Actuellement les études d'impact environnemental sont à refaire et l'enquête d'utilité publique montre une désaprobation de la population. Soutenus par les locaux, nous avons cultivé 7 hectares en agriculture "bio" et installé un troupeau de chèvres. Nous avons demandé parallèlement au propriétaire et au préfet un droit d'exploiter les terres en payant un bail agricole.

Le 19 juin nous avons reçu l'ordonnance d'expulsion qui prendra effet le jeudi 26 juin 2008. Nous avons choisi de continuer de protéger ces terres et appelons à une occupation massive et pacifique du site.
Le temps compte. Nous avons besoin de chacun. Rejoignez nous dès maintenant!

contact sur la ferme : Laurent au 06.61.24.43.69
adresse: ferme du chêne 16500 Ansac sur vienne à 5kms de Confolens, en direction de Ruffec juste avant Alloue au lieu dit le Chêne.
Possibilité de venir vous chercher à la gare de Rufec.
Toutes les infos et vidéos sur le site internet : http://lechene.magraine.net/